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Dénonciation calomnieuse

    Denonciation calomnieuse

    LA DÉNONCIATION CALOMNIEUSE

    S’il est louable et courageux de dénoncer des faits dont on a été victime, que se passe-t-il lorsque l’on dénonce des faits que l’on sait pertinemment inexacts ?

    Située aux confins de la fake news et de la délation, l’infraction de dénonciation calomnieuse, bien plus complexe qu’elle n’y paraît, entache malheureusement la bonne foi des véritables victimes.

    Qu’est-ce que la dénonciation calomnieuse ?

    • La définition de la dénonciation calomnieuse :

    La dénonciation calomnieuse consiste à dénoncer aux autorités un fait que l’on sait totalement ou partiellement inexact.

    • Le fondement juridique de la dénonciation calomnieuse :

    L’infraction de dénonciation calomnieuse est prévue et réprimée par l’article 226-10 du Code pénal :

    «  La dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, d’un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l’on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu’elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l’employeur de la personne dénoncée est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.

    La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée.

    En tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci. »

    Le législateur a préféré opter pour une conception assez large de l’infraction. Ainsi, si la dénonciation calomnieuse permet de sanctionner bien souvent la partie civile qui aurait déclenché injustement des poursuites pénales, elle aura par exemple également vocation à s’appliquer pour des faits de signalement effectués auprès d’un médecin hospitalier ou d’une assistance sociale « tenus d’informer les autorités judiciaires des atteintes sexuelles infligées à un mineur de quinze ans dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions » (Cass. crim. 22 oct. 2002, n°01-87.294).

    • Les éléments constitutifs  de la dénonciation calomnieuse :

    La dénonciation calomnieuse est une dénonciation spontanée, qui peut être faite par tout moyen.

    Elle doit porter sur des faits inexacts de nature à entraîner des poursuites (d’ordre judiciaire, administrative ou disciplinaire).

    La dénonciation doit également être dirigée contre une personne déterminée et devra être adressée à une personne susceptible d’y donner suite.

    Plusieurs conditions cumulatives sont donc nécessaires afin de constituer le délit de dénonciation calomnieuse :

    – La dénonciation : peut être effectuée par tout moyen. Elle peut par exemple prendre la forme d’une citation directe, d’une lettre envoyée au président de la chambre de l’instruction ou encore d’une délibération d’un conseil municipal.

    – La dénonciation doit être dirigée contre une personne déterminée : il peut s’agir aussi bien d’une personne physique que d’une personne morale. Le délit sera constitué quand bien même la personne visée n’a pas été dénommée mais désignée en termes équivalents.

    – La dénonciation doit être spontanée : l’auteur doit agir volontairement, sans aucune contrainte extérieure. Cette démarche indépendante doit être appréciée sans tenir compte de la fausseté du fait dénoncé.

    – La dénonciation doit être de nature à exposer son auteur à des sanctions pénales, administratives ou disciplinaires : les faits dénoncés doivent donc être punissables.

    – La dénonciation doit être calomnieuse : les faits dénoncés doivent être partiellement ou totalement inexacts. L’auteur doit pertinemment savoir que les faits sont faux. Outre cette mauvaise foi manifeste, il importe également que les faits aient été préalablement déclarés faux par l’autorité compétente.

    L’alinéa 2 de l’article 226-10 du Code pénal pose une présomption à cet égard en estimant que « La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée. ». Dans ce cas, les juges devront uniquement motiver leur décision par rapport à l’existence ou non de la mauvaise foi chez le dénonciateur. Les juges ne pourront pas se prononcer sur la pertinence des accusations formulées.

    Concernant les autres faits, extérieurs à cette présomption, le tribunal reste libre d’apprécier la pertinence des accusations portées. Il en sera ainsi par exemple de la décision de classement sans suite d’une plainte qui ne constitue pas une décision de fausseté sur les faits dénoncés.  

    La répression de la  dénonciation calomnieuse :

    Le délit de dénonciation calomnieuse est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 Euros d’amende pour les personnes physiques. Des peines complémentaires telles que l’interdiction des droits civiques, civils, de famille sont également prévues (article 226-31 du Code pénal).

    Les personnes morales encourent quant à elles une peine d’amende pouvant s’élever jusqu’à 225 000 Euros (article 131-38 du Code pénal) ainsi que « l’interdiction à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus d’exercer directement ou indirectement une activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, ainsi que l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée » (article 226-12 du Code pénal).

    La prescription de la dénonciation calomnieuse :

    La dénonciation calomnieuse est un délit qui se prescrit par six années à compter du jour où la dénonciation est parvenue à l’autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, et non au jour où la fausseté des faits a été établie (Cass. crim., 1er déc. 1955). À cet égard, la prescription sera suspendue lorsque des poursuites concernant le fait dénoncé sont exercées.

    La dénonciation calomnieuse ne doit pas être confondue avec la dénonciation mensongère:

    À la différence de la dénonciation calomnieuse, la dénonciation mensongère consiste à « dénoncer mensongèrement à l’autorité judiciaire ou administrative des faits constitutifs d’un crime ou d’un délit qui ont exposé les autorités judiciaires à d’inutiles recherches » (article 434-26 du Code pénal). Il ne s’agit pas d’une infraction contre les personnes mais d’une infraction contre l’État, la justice. La dénonciation mensongère s’intéresse uniquement aux faits mensongers dénoncés, la calomnie n’est pas requise.

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